Le conflit créé et entretenu entre le ministère de la Justice et les Magistrats mérite une attention de l’exécutif national au risque d’une dégénérescence ! Il est impérieux que la Première Ministre, cheffe du gouvernement rappelle le Ministre de la Justice et garde des Sceaux au respect des textes et surtout du cadre de collaboration entre les institutions, car l’activisme observé depuis quelques semaines contre les Magistrats est très dangereux ! Pourquoi c’est très dangereux?

Premièrement, il relève d’une erreur grave du jugement à travers une déduction remettant en cause tout le Pouvoir judiciaire!

Et deuxièmement, cet activisme livre les Magistrats à la vindicte populaire, heureusement que côté Magistrats, le Président du Conseil Supérieur de la Magistrature et son bureau les appellent à la retenue et au respect des textes légaux !

Plusieurs juristes de renom soutiennent le CSM dans son dernier communiqué rendu public mercredi 04 septembre 2024. Du nombre de ces juristes, Maître Jean – Marie Kabengela Ilunga. Invité de quelques médias nationaux, cet avocat déclare que la circulaire du ministère de la justice interdisant le transfèrement à la prison des personnes non condamnées n’a pas d’avenir sur le plan juridique !

Selon Maître Kabengela Ilunga, le communiqué du ministère de la justice du 02 Septembre coulée sous forme d’une circulaire, interdisant aux magistrats de transférer des personnes non condamnées au CPRK et à la prison militaire de Ndolo, sauf dérogation du ministre, est un ordre « manifestement illégal » sur pied des dispositions de l’article 70 de la loi organique portant organisation, fonctionnement et compétence des juridictions de l’ordre judiciaire qui consacre l’indépendance des magistrats du ministère public vis-à-vis du Ministère de la justice :

« …Celui-ci dispose d’un pouvoir d’injonction sur le parquet. Il l’exerce en saisissant le Procureur Général près la Cour de Cassation ou le Procureur Général près la Cour d’Appel selon les cas sans avoir à interférer dans la conduite de l’action publique », a-t-il rappelé avant de démasquer les nostalgies les intentions des animateurs de ce ministère :

« Quand bien-même le ministre de la justice donnerait cette injonction, le magistrat du parquet reste maître de l’action publique, il peut apprécier autrement, continuer les poursuites ou ne pas poursuivre. Donc, le ministre ne peut pas aller au-delà. Nous l’avons constaté qu’avec le changement législatif, ceux qui animent le ministère de la justice se sentent déplumés, ils considèrent que le pouvoir qu’ils avaient à l’époque de la deuxième république sur les magistrats leur échappe. Nous avons voulu du pouvoir judiciaire indépendant, le dernier rempart de nos libertés. Raison pour laquelle, il ne reste que cette passerelle d’injonction positive ou négative avec l’appréciation souveraine du magistrat du parquet. »

Maître Kabengela a en outre démontré combien cette circulaire, non seulement créée l’insécurité juridique et judiciaire, mais surtout, défie le pouvoir du Chef de l’Etat :

« La constitution dit que le juge est indépendant dans l’accomplissement de sa mission, il ne peut recevoir l’ordre de personne. Les juges de paix, les juges de grandes instances prennent des ordonnances de mise en détention préventive et, ces dernières permettent à ce que des personnes sur lesquelles pèsent les indices sérieux de culpabilité soient éloignées de la société, leur liberté soit restreinte ; cette circulaire refuse aux juges de prendre des ordonnances qui doivent être exécutés au nom du Chef de l’Etat. C’est ça l’insécurité juridique et judiciaire. », a insisté cet avocat de carrière.

Il met cependant quiconque à défi quant à la non-exécution de la dite circulaire :

« …Ça ne va pas être exécutée. Vous savez ce que représente la criminalité dans notre pays ? L’exécuter c’est créer une insécurité généralisée dans le pays. L’impunité que l’on chante ce n’est pas seulement vis-à-vis des officiels, des ministres, etc… L’impunité c’est aussi lorsqu’on remet en liberté quelqu’un que le juge a trouvé qu’il représente un danger avéré pour la société. Les magistrats du parquet qui sont bien formés comprennent que dans cette circulaire, il y a l’exception d’illégalité ; une illégalité manifeste et l’exécuter, c’est mettre le pays en danger. » Ce n’est pas a-t-il poursuivi, « parce que vous voulez que la politique de désengorgement ait des effets palpables à l’honneur d’un homme que vous devez mettre en péril l’intérêt général, la vie et la sécurité de toute une population. »

A l’en croire, le désengorgement ne devrait pas avoir pour effet de favoriser la criminalité, l’impunité et devrait être précédé par la construction des nouvelles maisons d’arrêt et des nouvelles prisons pour que ceux qui sont entassés trouvent de lieu de détention ailleurs.

Jean – Marie Kabengela, promet de saisir les instances judiciaires pour faire retirer cette circulaire si son auteur ne le retire pas de soi :

« C’est une circulaire qui n’a pas d’avenir sur le plan juridique, il doit la retirer de lui-même ou bien sur instruction de la Première Ministre. Si ce n’est pas fait, on est prêt à l’attaquer devant la Cour Constitutionnelle ou le Conseil d’Etat selon le cas parce qu’il y a les moyens à la fois constitutionnels et légaux à invoquer contre une telle circulaire. »

Par Rédaction Écho du CongoMagazine numérique

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