Le paradoxe congolais : des milliards pour l’armée, la misère pour les familles de héros

Alors que la République Démocratique du Congo fait face à des défis sécuritaires persistants, une contradiction flagrante émerge : des sommes colossales sont allouées à la sécurité, tandis que les veuves de militaires, celles-là mêmes qui ont payé le prix ultime pour la nation, continuent de vivre dans le dénuement.
Selon des informations récentes, le gouvernement congolais aurait dépensé près d’un milliard de dollars pour la sécurité en seulement quatre mois, de janvier à avril 2025.
Pourtant, un cri de détresse monte des provinces, où des veuves de militaires réclament leur dû, parfois depuis des années.
La situation est d’autant plus alarmante que les préoccupations sont exprimées au plus haut niveau de l’armée. Le Lt-Général Johnny Luboya, gouverneur militaire de l’Ituri, a tiré la sonnette d’alarme sur l’impact direct de cette négligence sur le moral des troupes. « Un militaire qui apprend que les veuves ne sont pas payées, pourquoi devrait-il se sacrifier ? Il se dira que s’il meurt, ses enfants connaîtront le même sort. Cela affecte directement le moral des troupes et peut déstabiliser toutes les opérations », a-t-il déclaré, soulignant la corrélation directe entre le bien-être des familles des soldats et l’efficacité des opérations militaires sur le terrain.
Pourtant, un discours bien différent résonne dans les cercles officiels à Kinshasa. Le commandant de la Garde Républicaine, Ephraïm Kabi Kiriza, a ainsi fièrement affirmé que « Nos femmes ont retrouvé leur beauté, nos enfants sont bien soignés au camp Tshatshi. » Cette déclaration, qui suggère une amélioration significative des conditions sociales pour les familles des militaires, contraste de manière saisissante avec la réalité vécue par des centaines, voire des milliers de veuves et d’orphelins à travers le pays.
Ces contradictions flagrantes soulèvent de sérieuses questions sur la gestion des fonds alloués à la défense et à la sécurité :
- Dépenses record en sécurité, mais veuves et familles militaires abandonnées : Comment justifier des investissements massifs dans l’appareil sécuritaire lorsque les familles de ceux qui se battent et meurent pour le pays sont laissées pour compte ?
- Officiers qui vantent l’amélioration sociale, pendant que des soldats doutent du sacrifice : La dissonance entre les discours officiels et la réalité du terrain crée un fossé de confiance qui pourrait, à terme, fragiliser l’engagement des troupes.
- Multiples rapports sur les arriérés, mais aucun responsable sanctionné : Malgré les alertes répétées concernant les arriérés de paiement et les difficultés rencontrées par les veuves, l’absence de sanctions contre les responsables de cette situation perdure, alimentant un sentiment d’impunité.
- Discours triomphalistes à Kinshasa, réalité amère sur le front : La déconnexion entre la communication gouvernementale et la dureté de la vie quotidienne pour de nombreuses familles de militaires est palpable, et menace de miner la crédibilité des autorités.
Alors que la RDC aspire à la stabilité et à la paix, la question demeure : à quoi servent les milliards dépensés pour la guerre si la douleur des veuves et l’incertitude quant à l’avenir des soldats demeurent inchangées ? La crédibilité des opérations militaires et la cohésion nationale dépendent intrinsèquement de la capacité de l’État à honorer ses engagements envers ceux qui se sacrifient pour sa défense.
Ignorer la détresse de ces familles, c’est risquer de compromettre non seulement le moral des troupes, mais aussi les fondements mêmes de la sécurité et de la justice sociale en République Démocratique du Congo.