Les observateurs aguerris des scrutins électoraux en République démocratique du Congo (RDC) ont l’habitude de dire que chaque nouvelle élection est plus mal organisée que la précédente. Le scrutin de ce mercredi 20 décembre ne déroge pas à la règle. Confusion, désorganisation, désordre… On ne sait quel mot choisir pour qualifier le quatrième cycle électoral congolais. Toute la journée, les réseaux sociaux ont été saturés d’images et de vidéos montrant les nombreux dysfonctionnements qui ont émaillé la journée.

Pour commencer, il y a eu un certain retard à l’allumage. Selon la mission d’observation électorale des églises catholiques et protestantes (CENCO-ECC), qui avait déployé 25.000 personnes aux quatre coins du pays, un peu plus de 30% des bureaux de vote n’ont pas pu ouvrir mercredi. Les observateurs notent également que des 45% des centres de vote ont connu des dysfonctionnements du dispositif électronique de vote. Mais ce n’est pas tout, 7% des bureaux ont enregistré des violences et 5% ont été tout simplement saccagés, comme cela a été le cas à Bunia. Enfin, les nombreuses cartes d’électeurs rendues illisibles par la mauvaise qualité de l’impression, ont empêché certains Congolais de voter. Leur nombre n’est pas encore connu.

Depuis plusieurs mois, l’opposition et les observateurs internationaux tiraient la sonnette d’alarme, accusant la CENI de ne pas être prête pour organiser le scrutin dans de bonnes conditions. Le chaos logistique prévisible de ce mercredi ne fait que confirmer que la centrale électorale a organisé le vote en catastrophe et à marche forcée, alors que le déploiement du matériel de vote avait pris d’importants retards. Face au chaos, la CENI a décidé de prolonger le vote jusqu’à tard dans la nuit pour les bureaux de vote qui avaient ouvert avec retard et jusqu’à jeudi pour ceux qui étaient restés fermés mercredi. A 20h00 à Goma, on assistait à une situation ubuesque où certains bureaux continuaient de fonctionner, alors que d’autres commençait le dépouillement.

Dans la confusion du scrutin, cette journée de vote à tout de même apporté un début de réponse sur le taux de participation des Congolais à ces élections générales. Certains observateurs prédisaient une lassitude des électeurs. Si aucun chiffre n’est encore connu, les informations qui remontent des provinces, notamment dans les grandes villes, ont montré une forte mobilisation des Congolais pour aller voter. Mais la confusion, le désordre, et la prolongation du vote dans certains bureaux, affectent fortement la crédibilité du scrutin et portent les germes d’une future contestation des résultats. Le président de la CENI a assuré qu’aucun électeur ne serait en mesure de voter deux fois. Mais les opposants Martin Fayulu, Denis Mukwege et Floribert Anzuluni ont déjà appelé les Congolais, la Communauté des pays d’Afrique australe (SADC), l’Union africaine (UA) et la Communauté internationale « à exiger la réorganisation des élections par une autre Commission électorale ». Mais ce que l’on redoute dans l’opposition, c’est l’annonce au forceps « d’une victoire frauduleuse » de Félix Tshisekedi, qui ouvrirait la voie à une nouvelle crise politique au Congo. Une crise post-électorale qui pourrait se résoudre, comme à l’accoutumé au Congo, par l’ouverture d’un dialogue national et « une main tendue » vers l’opposition. Un scénario maintes fois utilisé par les régimes en place pour se maintenir au pouvoir.

Christophe Rigaud/afrikarabia/Ruzizilaplume

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